box de Soul Eater

- hakuna matata, mais quelle phrase magnifique...
dimanche 1er septembre.

Déserteuse. Voilà le surnom qui m'irait le mieux, je n'avais pas donné signe de vie au haras de pado depuis bien longtemps et je sentais que les gens m'en voulaient. Ceci dit, au moins, j'étais revenue. Après tout, j'ai des chevaux dont je dois m'occuper n'est-ce pas ? En ce jour de pluie, le premier sur ma liste était Soul Eater. Rien que son nom faisait que je l'aimais déjà, mangeur d'âmes, si c'est pas cool ça. Je me souvenais vaguement du pourquoi du comment je l'avais reçu... Je crois qu'en fait, on me l'avait confié car on avait eu vent que je cherchais des têtes brûlés. Voilà qu'en plus d'être une lâcheuse, on allait me prendre pour une masochiste, super réputation. Mais j'étais la seule à blâmer, ce que les autres pensent de moi, c'est ma responsabilité. Après tout si j'avais pu être quelqu'un de normal qui vient chaque semaine s'occuper de son chouchou attitré qui est une perle, j'en serai pas là. Quoiqu'il en soit, ça ne me dérangeait pas vraiment, du moment que je pouvais faire ce pourquoi j'étais venue... Je me dirigeai vers l'entrée des allées de mon écurie et poussai la vieille porte. Je fis un soupir de soulagement en rentrant, j'étais au sec... Quelques têtes curieuses se retournèrent. Je reconnus aisément Charade, Faëdryth, Kitsune, Buzz et même le petit dernier, Rolden. Quand à Enjoy et Okapi, ils étaient dehors, dans leurs petits paddocks aménagés. Soul Eater, lui, je l'avais mis en seconde ligne, tout simplement parce que son problème de comportement était d'être trop joueur, alors que pour moi, ceux qui devaient aller au fond, c'était les sadiques. Le représentant de cette classe étant le pur sang espagnol noir de jais qui était tellement insupportable que je mettais débarrassé de lui en le laissant croupir à l'extérieur. Cette pensée m'arracha un sourire en coin, on pouvait rajouter sadique à ma liste de points de caractère, mais en réalité, si j'avais fait ça, c'était parce que c'était dans son intérêt. Un coup de tête sur mon épaule gauche me sortit de mes rêveries. Heureusement, je me tenais assez éloignée pour que le coup ne m'atteigne pas à la puissance que l'agresseur avait souhaité. C'était lui. Je lui jetai un regard à en faire pâlir plus d'un.

« Non mais oh, tu t'es pris pour qui ? Je te ferai dire qu'au dernière nouvelle, t'es pas Zidane et que même si je suis italienne, ça ne t'en donne pas le droit ! »

Il secoua sa caboche de haut en bas, amusé de m'embêter. A croire qu'il était complètement attardé celui-ci. J'en avais connu des chevaux dans ce style, mais aucun qui trouvait marrant ça. D'ailleurs, ça lui valut l'incompréhension de ceux dans les box voisins. Enfin, voisins... Oui et non, je laissais toujours une place de libre entre comme je connaissais pas leurs affinités, mais l'idée est là. Je posai mes affaires et m'étirai, ça risquait d'être comme un match de foot. L'étalon recula pour me laisser ouvrir la porte. Dès que j'eus une vue un peu plus complète de lui, je l'analysai. Il était sale à l'extrême, mais on devinait non sans mal qu'il était foncé. Je remarquai que ses sabots étaient clairs et qu'il avait quatre petites balzanes. Il était plutôt beau... L'hanovrien mit ses oreilles bien droites, il devait être content d'avoir un peu d'attention. Mon sourire s'étira, moi aussi j'étais heureuse de m'occuper de lui. Cependant, au moment où je m'approchais pour lui mettre le licol bordeaux, je compris son enthousiasme, en fait, ce qui l'égayait, c'était de pouvoir faire son pitre. Comme pour confirmer mes dires, il me projeta sur le sol en me bloquant le pied et en me poussant avec son épaule. Je me relevai péniblement.

« On va pas être potes je crois... »

Je lui donnai un tape sur la croupe pour simple punition. Il manqua de se cabrer sous la surprise. A vrai dire, cette réaction m'interloqua, c'était comme si on lui avait appris à faire l'andouille et qu'on l'engueulait alors qu'il faisait ce qu'on lui demandait. Le voilà son soucis, il avait mal été éduqué. Il faudrait que je pense à fouiller dans mes papiers pour retrouver la personne qui m'avait confié ce bougre d'âne. Je lui agrippai la crinière et bloquai sa tête pour pouvoir lui mettre son licol. Il se laissa faire sous ma plus grande incompréhension, je n'arrivai pas du tout à comprendre ses faits et gestes. Je le sortis en lui flattant l'encolure pour sa coopération. Je fis rapidement le nœud magique et me baissai pour prendre les premières brosses. Pas une, pas deux, le diablotin en profita pour me chiquer la cuisse. La douleur fut intense, mais de courtes durées, ce n'était pas aussi fort que quand c'était Okapi qui me l'avait fait. Je me redressais vivement et il se toqua le bout du nez contre mon dos, je pivotais pour lui faire face et lui administrai un tape sévère sur la hanche tout en vociférant des menaces. En fait, il avait juste attendu de me mettre en confiance pour me pousser à commettre une erreur et en profiter. Vicieux en plus de ça. Je pris mon étrille en caoutchouc et commençai à frotter énergiquement sur sa robe en forme de ronds. Des morceaux de terre tous plus gros les uns que les autres se décollèrent. Hé ben, ça faisait un bail que je n'avais pas vu un cheval aussi sale. Il sembla apprécier ce petit massage préliminaire et se laissa aller sur un postérieur. Je ne me ferai pas avoir deux fois, mieux vaut se méfier de l'eau qui dort... Je pris bien soin de le contourner à l'arrière pour éviter de me prendre une ruade, mais il ne tenta pas le coup. Je m'appliquais bien sur les zones charnues et il m'aida même puisqu'il se secoua pour faire partir un peu plus vite la boue. Soul Eater avait l'air d'apprécier d'être chouchouter. Je saisis ma brosse dure et la passai dans le sens du poil. Il ronfla de bonheur. Je fis comme si de rien était, si ça me permettait de rester au calme plus longtemps... J'en profitais pour aussi déloger quelques brins de paille de sa crinière et de sa queue. C'est là qu'il passa à l'acte, il essaya vainement de me mordre le coude au moment ou je m'attaquais au toupet. Je fus la plus rapide et m'écartai illico presto en lui donnant un petit coup de longe sur l'épaule. Il détourna sa tête et la baissa au ras du sol. Je ne fis pas attention du tout à ce qu'il faisait et me concentrai maintenant sur la brosse douce. Là je pouvais bien m'attarder dans les coins sensibles. Je remarquais d'ailleurs que ceux-ci étaient de couleur baie presque alezan. C'était donc un peu pangaré. Une fois fini, je m'éloignais pour admirer mon travail. Superbe, vraiment magnifique. Bon certes, il était encore un peu crado, mais que voulez-vous, on ne peut pas tout avoir dans la vie. Je soupirai de soulagement, plus que les sabots et... ?! Au moment où je cherchais mon cure-pieds, je remarquai qu'il l'avait déjà en bouche. Mon sang ne fit qu'un tour. J'essayai de lui retirer en tirant de toutes mes forces, mais rien à faire, il arrêta pas de secouer dans tous les sens. D'un coup il lâcha prise et je me retrouvais affalée sur le sol, k.o. Il hennit de joie, quel manipulateur. Je le grondais sévèrement et me remettais au travail. Je ne me penchis pas comme d'habitude pour éviter de me faire chiquer à nouveau et me mis donc dans la position contraire. Il renâcla, son plan était tombé à l'eau. Bien fait. J'en profitais pour lui nettoyer plus amplement ses membres à l'aide d'une éponge légèrement imbibée d'eau. Je vérifiais également ses fers. Le postérieur gauche me causa quelques soucis car sa pitrerie revint à la charge. Il n'arrêta pas de le bouger et moi qui me démenait pour le curer... Une belle équipe de bras cassés je vous dis ! Après 3 minutes à m'acharner pour terminer mon boulot, je réussis enfin à reprendre le dessus. Je ne traînais pas plus longtemps et finis en un temps record. Je pris un stylo et mon carnet de dessin et observai mon chef-d'oeuvre. J'avais déjà fait le plus gros du croquis, plus qu'à mettre les détails voilà.

« Ave moi ! J'ai géré... T'as vu espèce d'idiot, je ne me laisse pas aussi facilement ber- ?! »

Encore une fois je fus couper dans mon élan. Il avait défait le nœud et trottait fièrement dans l'écurie. Non mais il se la pétait en plus ! Je lui courrai après pour le rattraper et il se cabra majestueusement devant moi, remuant bien les antérieurs. Je levai haut les bras, il ne m'impressionnait pas. Il se vexa et revint à terre. Je saisis fermement la longe et le ramenai à son box en grommelant, je n'avais aucunes envies de le monter aujourd'hui, très peu pour moi le rodéo.

« C'était fait exprès... C'était pour calculer ton niveau d'intelligence...Hé ben il est comme je l'avais prévu : bas. Gros sac, tu vas voir, ma vengeance sera terrible... »

Il avait l'air de s'être amusé durant cette séance. Je lui ôtai le licol et refermai la box. Ouf, enfin, j'en avais terminé avec lui ! D'ailleurs, pour me montrer toute sa gratitude, il me montra les fesses en mangeant goulûment son foin. Au moins j'avais pu me faire une idée de la bête, malgré mes erreurs, mais c'est humain dit-on. Je souris, le prochain sur ma liste allait avoir plus de mal à m'avoir après ma remise à niveau avec Soul Eater.