While Duster était un bel étalon gris KWPN de 6 ans. Il était pile dans le bon âge. Je l’avais acheté comme ça, un seul regard avait suffit. Le portefeuille avait un peu grincé des dents, mais le coup de cœur ne trompait pas. J’avais toujours le chic de choisir des étalons aillant des aptitudes en dressage, un caractère bien fort mais jamais méchant. Bien évidemment je ne choisissais pas le caractère de mes poulains, donc j’excluais de mes critères mes trois bébés. Je n’avais encore jamais monté While, juste quelques caresses et pansages dans le box. On dit toujours que l’on doit gagner la confiance d’un cheval, mais je crois que le cheval doit aussi gagner la confiance de son cavalier. La confiance ne va pas que dans un sens. Pourquoi un cheval aurait le droit de tester vos limites mais nous non ? Un cheval n’est pas en sucre, ce n’est pas une diva. Il doit lui aussi mériter notre respect. J’avais fait des erreurs, avec un de mes poulains par exemple, et je ne voulais plus les reproduire. C’est pour cela que je restais sur mes gardes. Aujourd’hui, je voulais tester le beau gris, apprendre à le connaître de mes propres sentiments et pas que de ceux de son ancien propriétaire.
Je l’amenais, sellé et bridé d’un simple filet et d’une simple selle classique. Je lui avais mis des guêtres au cas où. Sans passer par quatre chemins je montais sur une grosse pierre qui me servait habituellement de montoir et grimais doucement sur mon entier. Il ne bougea pas au montoir. C’était déjà un bon point. Je l’emmenais rênes longues jusqu’au manège. Il ne broncha pas à l’entrée. Enfin un cheval simple, stable dans sa tête. Le dernier cheval que j’avais monté était Game Over, et qu’est ce qu’il était compliqué. Rien n’était simple avec lui. While était reposant.
Je le laissais rênes longues dans le manège, vagabonder à sa guise. Je restais quand même sur mes gardes, ne le connaissant pas. Il marcha d’un bon pas, rien d’extraordinaire. Je commençais à être un peu sceptique. Des chevaux d’excellence j’en avais vu, et le pas ne trompait pas. J’arrêtais le cheval au centre du manège, de profil aux longs miroirs latéraux. Une fraction de seconde et mes doutes disparurent. On pouvait voir que son encolure était plutôt bien développée, et qu’il était bien rond. Je baissais les yeux pour constater que la pyramide garrot-épaules était presque parfaitement dessinée. Ce cheval était un cheval d’excellence, et ce n’était pas une supposition. Il lui restait encore une petite part de muscle à prendre, mais c’était bien un animal de concours. Je souris. Soit l’ancien propriétaire était vraiment débile au point de ne pas se rendre compte de la Ferrari qu’il possédait, ou alors il n’était pas assez intéressé pour s’en occuper comme il aurait du le faire pour frôler la perfection. Tant pis pour lui, et tant mieux pour moi.
Je remontais sur mes rênes pour faire partir le beau gris au trot. C’était un trot de travail, appréciable pour une détente. Et c’est pendant une détente qu’on en apprend le plus sur un cheval. Sur ses capacités, peut être aussi sur son caractère. While n’était pas une immense bête, au contraire il était même un peu petit. Pourtant je fus surprise de voir a quel point ses foulées étaient longues. J’arrivais à l’autre bout du manège en une rapidité étonnante, sans pour autant être dans une cadence rapide. Le cheval était vif, il trottait gracieusement. C’était tellement agréable, cette légèreté si rare. Le trot était aérien, rebondi et en équilibré. Trois qualités prisées des carrés de dressage. Je n’eu qu’à jouer un minimum dans mes doigts pour que l’angle tête encolure se ferme à 90° avec le chanfrein bien à la verticale.
Je repassais ma monture au pas pour la galoper un peu. M’installant sur un cercle, je demandais le galop du pas, avançant légèrement ma main intérieure pour que le mors ne bute pas lors du départ. Il partit par une prise d’équilibre, au galop rassemblé. Dans le plus grand des calmes, il rassembla puis allongea au deux mains. Je ne rencontrais aucunes difficultés, si ce n’était sa tendance à vouloir changer de pied lorsqu’il passait en X à main gauche. Mais je renforçais mes aides et il ne broncha pas, sûrement l’habitude d’en faire à cet endroit là. Nous repassâmes au trot puis au pas.
Après être descendue pour placer quelques barres, je trottais sur un cercle l’étalon histoire de le réchauffer un peu. Le propriétaire ne m’avait pas parlé de ses compétences à l’obstacle et je m’en étais intriguée. Tout d’abord je le fis trotter aux deux mains sur une série de barres au sol. Il ne sembla pas déboussolé. Je le guidais ensuite calmement sur un petit croisillon d’à peine 30cm. Il perdit tous ses moyens chargea la barre pour s’arrêter juste devant et l’enjamber au pas. J’arborais une mine déconfite. Ce cheval ne semblait pas avoir fait beaucoup d’obstacle. Je ne perdis pas patience et tenta de lui faire passer l’obstacle de nouveau. Il refit le même manège, malgré que je lui mette des jambes. Sa réaction était vraiment curieuse. Peut être avait il peur de quelque chose. Je l’emmenais doucement au pas vers les barres pour le laisser renifler un peu. Il les regarda à peine, et c’est limite s’il ne les flaira pas. Je le fis prendre le croisillon de l’autre main, mais rien à faire il ne voulait pas. Je descendis pour enlever la croix et mettre juste une barre au sol entre les chandeliers. Il la passa sans problème, comme si de rien était. Le problème venait du saut. Peut être ne savait-il pas sauter ? Nous avions tout notre temps, ce n’était pas un problème. Je plaçais la croix à 10cm, et alla la sauter au petit trot, très calmement. Il l’enjamba, l’air de rien. Je constatais qu’il commençait à fatiguer et pour éviter toutes blessures inutiles je le marchais rênes longues un peu partout, au pas. Puis tout doucement, nous prîmes le trot et je lui demandais une descente d’encolure en laissant filer mes rênes pour qu’il étende sa nuque. Je le repassais au pas puis nous quittâmes le manège pour un faire un petit tour du haras avant de rentrer au box.
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Ven 15 Fév - 8:47